Mathématiques et Philosophie, DR, CNRS Ecole Normale Supérieure
longo [chez] ens.fr
The analysis of concepts, conducted on a comparative level if possible, as well as the (tentative) explanation of the philosophical project, should always accompany scientific work. In fact, critical reflections regarding existing theories are at the core of positive scientific constructions, because science is often constructed against the supposed tyranny and autonomy of « facts » which in reality are nothing but « small-scale theories ». Science is also often constructed by means of an audacious interpretation of « new » (and old) facts ; it progresses against the obvious and against common sense (le « bon sens ») ; it struggles against the illusions of immediate knowledge and must be capable of escaping from already established theoretical
frameworks. For example, the very high level of mathematical technicity in the geometry of Ptolemaic epicycles constructed from clearly observable facts strongly perplexed numerous Renaissance thinkers such as Copernicus, Kepler and Galileo… : in order to account for the movements of the stars and for the « obvious » immobility of the earth, circles that were added to circles, centers of new circles, were established with and extraordinary geometrical finesse and gave way to uncountably many « publications » (of very high Impact Factor, at least till the middle of the XVII century). Yet they
failed to convince the aforementioned revolutionary critical thinkers. And, as Bachelard rightly puts it, the construction of knowledge was then founded, as was Greek thought, upon an epistemological severance, which operates a separation with the previous ways of thinking.
But it is recent examples that interest us, where the critical view finds expression on a more punctual basis, by means of « negative results ». Let’s explain.
When Poincaré was working on the calculi of astronomers, on the dynamics of planets within their gravitational fields, he produced, by purely mathematical...
Au cours des années 1930, un croisement très riche entre le questionnement philosophique sur les fondements des mathématiques, la réflexion sur la cognition humaine et les techniques mathématiques nouvelles, est à l’origine de l’ordinateur moderne. A l’époque, les machines à calculer existent déjà, de celle de Babage (1850) aux machines analogiques comme le « Differential Analiser » de V. Bush (1927), mais c’est le problème épistémologique de la complétude déductive des formalismes axiomatiques, qui amènera à l’invention des concepts fondamentaux du calcul digital moderne.
L’analyse logique de la preuve chez Herbrand (sa thèse, 1930, Ens-Sorbonne) contient une première définition de la fonction récursive primitive (calculable au sens fort). Gödel (1931) et Turing (1936) enchaineront en donnant une réponse définitive au questionnement fondationnel de l’époque : est-ce qu’un calcul de signe potentiellement mécanisable et sans référence au sens permet de décider tout énoncé mathématique ? Peut-on en démontrer la cohérence par des arguments « finitaire » et formels ? Et, en fait, le raisonnement humain est-il
complètement réductible à un système de signes potentiellement mécanisable ?
Pour répondre à de telles questions philosophiques, ces grands mathématiciens durent préciser ce que veut dire « potentiellement mécanisable ». Autrement dit, pour construire des propositions indécidables ils durent préciser ce que veut dire décidable ou calculable en général, en donnant une formalisation mathématique (la classe des fonctions récursives) de la notion informelle de calcul. Turing, en particulier, en propose une définition particulièrement originale, sa Logical Computing Machine (LCM), idée abstraite d’un « homme dans l’acte minimal de calcul » (une remarque de Wittgenstein), et définit formellement par...