Les orientations du programme du Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée prises lors de sa transformation [1] ont renforcé un intérêt pour l’urbain et le contemporain. Le milieu urbain, support de rapports sociaux qui s’exercent dans la ville et opposent des usagers de la ville dont le regard et le point de vue sur leur environnement urbain divergent, exprime que ville peut se vivre différemment. Lieu multiculturel tant au point de vue des pratiques que des interrelations sociales et ethniques, il pose des questions d’urbanisation, de type d’habitats, d’écologie, mais aussi de partage et d’appropriation, de négociations et de conflits des espaces publics.
Les sujets sur lesquels j’ai consacré toutes mes activités scientifiques sont au cœur des questions de société qui concernent le musée : le skateboard et le graffiti.
Graffiti et skateboard : sujets de société…
Ces deux sujets représentent un rapport à l’espace urbain. Ils offrent des points de vue qui se télescopent entre esthétiques et dégradations…
Les activistes du skateboard comme du graffiti continuent de se répandre dans les villes en dépit des interdictions réinventant les rues, instaurant une expression esthétique urbaine populaire.
Ils constituent également un ensemble d’objets quotidiens du point de vue du graffeur et skateur parce qu’au cœur de leur vie et de leurs sociabilités. Ainsi modes de vie et objets ont été privilégiés dans ces recherches et collectes :
De nouveaux usages ludiques et sportifs ont (re)introduit une conception nouvelle, ou plutôt oubliée, de l’espace public, bousculant les habitudes et interdits. Le Parkour, flashmob, danses de rue, skateboard, roller, bmx, basket de rue, musiciens de rue, graffiti/street art, base jumping urbain, golf urbain...ces pratiques représentent une remise en cause d’usages établis jusqu’à lors. Vécues comme gênantes, et génératrices d’insécurité, elles contrarient l’ordre établi dans l’espace public et alimentent des débats publics. Toutefois il faut signaler que le regard envers ces pratiques s’est progressivement modifié.
Il s’avère utile de préciser la définition de l’espace public. Thierry Paquot établit une différence entre – espace public- et – espaces publics- . Pour lui, l’espace public au singulier évoque le lieu du débat public, de la « pratique publique, pratique démocratique » qu’il différencie des espaces publics, lieux de circulation des habitants (rues, places, jardins…) (Paquot, 2006). Pour ma part, espace ou espaces, il s’agit de communication. L’usage qui est fait des espaces publics peut être considéré comme politique dans la mesure où cet usage provoque des rencontres entre les différentes manières d’être dans la rue…
Plusieurs articles évoquent ce point de vue.
La visibilité et la sonorité provocatrices de ces pratiques correspondent à l’esprit d’une partie de la jeunesse [5] par leur caractère distinctif. En produisant dans la rue des spectacles de toutes sortes, elles transforment celle-ci en lieu de vie sensible. Ces pratiques mettent en scène le rapport des individus à leur environnement. Elles affirment, par leurs manières inhabituelles, minoritaires et jugées la plupart du temps dérangeantes, une manière de vivre l’espace public différemment.
En s’appropriant des lieux pour s’entraîner, pour s’amuser, se retrouver entre soi, défier soi-même et les autres,...